International béninois et grand voyageur, Arsène Loko a quitté l’Afrique subsaharienne pour tenter sa chance d’abord à Oman. Et désormais en Libye, où il dit s’épanouir à en Libye. En exclusivité pour 2022mag, il a accepté de raconter sa carrière et sa vie, loin de son pays.
« Arsène, racontez-nous : comment cela se passe dans le championnat libyen ? Pourquoi avoir accepté cette offre de Al-Akhdar, qui n’est pas un club réputé ?
Ca se passe très bien, merci ! Le championnat se joue sur deux zones, celle de Tripoli et celle de Benghazi, dans laquelle mon club Al-Akhdar évolue. Le niveau est bon. Il y a six à sept clubs qui se disputent les deux premières places. Tout se déroule à merveille. J’ai fait le choix de rejoindre Al-Akhdar qui m’a proposé un contrat alors que j’étais à Oman la saison 2019-2020. Je venais de rejoindre Al-Musannah, classé troisième avant l’arrêt du championnat. D’avril à août, c’était difficile de rien faire, donc j’ai rebondi sur l’offre d’Al-Akhdar. Je suis d’abord reparti en RD Congo auprès de ma famille puis j’ai rejoint la Libye.
Qui dirige le club, quel est objectif cette saison ? Y a-t-il d’autres africains au club avec toi ? Comment se passe la vie de joueur là-bas ?
Le coach est un tunisien, Sami Chammam. Je suis ici avec un autre Africain, Junior Makiese, un international congolais qui a joué CAN et CHAN. On est toujours ensemble. La vie ici est plutôt très calme. J’avais peur avant de venir ici, j’avais une idée préconçue de la Libye. Mais il n’y a rien de tout ça. C’est un pays calme. En tout cas, ça se passe bien jusqu’à présent. Rien de dangereux ou d’anormal ici. Pendant la journée, on s’entraîne vers 16-17h. Avant ça, je regarde des séries et je travaille les abdos, je fais les pompes. Parfois, je pars en salle de musculation avec mon coéquipier congolais. Je ne conduis pas mais mes coéquipiers vivent dans le même immeuble, alors on sort de temps en temps. On est à cinq-dix minutes en voiture de notre stade. L’objectif, c’était de titiller les grosses têtes comme Al Nasr et Al-Ahly de Benghazi. Maintenant, c’est de finir dans le top 2 et disputer le carré d’as pour jouer une coupe africaine. Dans le carré d’as, on joue contre les deux meilleurs clubs de la zone de Tripoli. Les deux premiers classés joueront la LDC, les deux suivants seront en CDC. C’est la première fois que le club peut espérer jouer une coupe africaine… si éventuellement on se qualifie, par la grâce de Dieu.
Vous évoluez à quel poste ?
J’ai l’avantage de jouer aux trois postes du milieu. Pivot défensif ou offensif ou bien relayeur. Je suis polyvalent, ce qui me permet d’être au service du coach en fonction de sa stratégie. Partout où je suis passé, j’ai joué en 6, en 8 ou en 10. En attaque aussi même si je suis milieu relayeur de formation. J’ai même joué en attaque au DC Motema Pembe de Kinshasa comme face à Al-Khartoum au Soudan où j’avais marqué. Je peux dire que j’ai de belles stats : en 5 matches, 2 buts et 2 passes décisives. Ca prouve que je me sens plutôt bien ici dans ce groupe.
Avant la Libye, vous avez joué en Côte-d’Ivoire, au CO Korhogo, à l’Africa, puis en RDC au Motema Pembe avant de signer à Oman, à Al-Nasr. Parlez-nous de ces diverses expériences…
Ca risque d’être long, alors je vais résumer mon parcours ! tout a commencé après que j’ai joué les inter-quartiers de vacances organisés par un député béninois. J’avais été élu meilleur joueur du tournoi. De là, ce député m’a envoyé en Côte d’Ivoire où je devais me rendre pour des congés. Une fois sur place, pourquoi ne pas chercher des essais avec des clubs. J’ai été au Denguélé, au Stella, en vain. Puis j’ai essayé Korhogo où j’ai signé une saison mais je n’avais pas droit au salaire. J’étais hébergé sur place. Mais je n’ai pas joué en D1.
C’est à l’Africa Sport, un club récemment relégué en D2, que vous vous êtes révélé…
A l’époque, iil y avait un championnat des réserves en semaine. J’ai joué contre l’Africa et j’ai été repéré par le coach George Lignon Nagueu malgré la défaite. Il m’a fait signer et j’ai joué quatre ans là-bas. Ma première saison fut bonne et m’a permis d’intégrer la sélection de mon pays, le Bénin, du temps d’Oumar Tchomogo. J’ai aussi goûté à la Coupe de la Confédération contre les Egyptiens d’ENPPI. J’ai remporté la Supercoupe ivoirienne aussi. L’Africa, c’était du bonheur malgré des hauts et des bas. J’étais en fin de contrat lorsque l’offre du DC Motema Pembe est parvenue. Je suis parti à Kinshasa.
Et vous avez rejoint la RD Congo !
Ca a été très difficile, avec des bobos la première saison. La deuxième saison, il y a eu l’arrivée des Italiens sur le banc, avec le coach. Ils m’ont relancé, fait confiance. J’ai su gagner ma place. Avec l’arrivée d’un nouveau président et d’un nouveau comité, ce fut ma plus belle saison au DCMP. On a joué la phase de poule de la Coupe de la Confédération, où on a été éliminés de justesse à égalité avec Zanaco, le 2e qualifié pour les quarts. Personnellement, ce fut une belle aventure sur la scène africaine. J’ai fait de bonnes prestations. La saison suivante, ça ne s’est pas trop bien passé. J’ai reçu l’offre d’Al-Nasr à Oman et je suis parti.
Comment s’est passée cette transition ?
J’ai été très bien accueilli. J’ai eu droit à des cadeaux de bienvenue. On était 4e à la mi-saison et puis Al-Musannah, un club rival, s’est manifesté et j’ai été transféré. Tout ça s’est arrêté avec la pandémie de coronavirus. J’ai pris la direction de la Libye mais Al-Musannah m’a laissé ma carte résidentielle. Et surtout, le club m’a réservé un billet d’avion en août pour que je revienne pour y jouer la prochaine saison.
Il y a une dizaine d’années, tu as aussi été un brillant participant à l’African Football Dream Team (AFDT), un programme de télé-réalité, sous la direction du coach Diego Garzitto. Qu’est-ce que ça a apporté à ta carrière ?
Ce fut une très belle expérience et je pense que tout est parti de là. J’ai eu à faire la connaissance d’une légende, Patrick Mboma, qui assurait l’intérim sur le banc en attendant que le coach Garzitto n’arrive en Guinée Equatoriale. On était des jeunes issus de onze pays. La sélection reposait sur une équipe type de 11 joueurs. J’ai été élu meilleur joueur de la sélection panafricaine cette année-là. Garzitto m’a inculqué les valeurs du travail. En dehors de l’entraînement, il était très ouvert à la discussion. Sur le terrain, il était très investi et rigoureux. Il disait toujours qu’il fallait se donner à 200% face à un adversaire. J’ai compris que le football, c’était autre chose. Ca a boosté ma carrière. On aurait dû faire des stages en France et recevoir une prime de 10 000 euros par joueur. Malheureusement, rien n’a été fait : ni stage ni primes ! Mais ce fut une belle aventure. Seule la fin ne fut pas à la hauteur. J’ai perdu le contact avec Garzitto mais il me répétait que j’avais du talent et des qualités. Mais que cela ne suffisait pas. Qu’il fallait que je travaille encore plus. On devait jouer contre la Guinée Equatoriale juste avant la CAN 2012 coorganisée avec le Gabon. Il m’a confié le brassard, on a fait 1-1. Ces deux mois et demi ensemble restent de bons souvenirs.
Parle-nous de ta carrière d’international béninois…
Je suis 100% béninois et j’en suis fier. Mes ambitions, c’est de porter le maillot de mon pays. J’ai été appelé sous Oumar Tchomogo et ma dernière sélection remonte à loin, en 2017 je crois. Mais j’espère toujours revenir en sélection. Ca passe par le travail en club. Chaque chose en son temps. J’ai une bonne relation avec nos supporters. J’aimerais jouer la CAN avec mon pays, j’en rêve même. On travaille pour que cela se réalise un jour.
Est-ce que c’est compliqué de faire une carrière dans des pays comme la Libye ou Oman ?
Aujourd’hui, il y a des opinions diverses sur le niveau de ces championnats. Je pense que tu peux grandir dans un championnat moyen, mais tout dépend de ton implication. De ton envie d’être au-dessus du lot. Moi, j’envisage de jouer en Europe même si je sais que c’est difficile, soyons réaliste.
Quelles relations as-tu avec le Bénin, la sélection, le sélectionneur Dussuyer ?
J’ai une bonne relation avec la sélection mais je n’ai jamais eu l’opportunité d’échanger avec Dussuyer. Quand j’ai joué la Supercoupe en Côte d’Ivoire, il était sélectionneur des Eléphants et travaillais à construire l’équipe locale pour le CHAN. A la fin d’un match, on m’a dit que j’avais été présélectionné mais bon, finalement, ça n’a pas débouché. Et j’ai opté pour le Bénin.
L’élimination par la Sierra Leone, ça t’a fait mal ?
Ca fait très mal, bien sûr ! Se faire battre à la dernière minute chez soi, puis être battu lors d’un match contre la Sierra Leone où on n’avait besoin que d’un point… Le plus important, c’est de bien se préparer pour les prochaines échéances.
Pour terminer, quels sont les meilleurs souvenirs de ta carrière ?
La naissance de mon petit garçon au Congo. La joie que j’ai entendue dans la voix de ma maman lorsque j’ai été appelé pour la première fois en équipe du Bénin, alors que je jouais à l’Africa Sport d’Abidjan. Elle ne voyait que par les études pourtant ! Mon pire souvenir, je dirais ma non signature pour Créteil en L2 française. Je m’entrainais avec la réserve. A la dernière minute, l’Africa Sport a été trop gourmand financièrement, ça a capoté. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai quitté ce club. J’ai aussi regretté qu’en dépit de tous mes efforts lorsque j’étais au DCMP (RDC), cela n’ait pas débouché sur mon retour en sélection malgré tous mes efforts… »
Propos recueillis par @Samir Farasha