Dans quelques heures débute la 32e édition de l’épreuve continentale. Le tournoi est escorté par deux nouveautés : sa programmation en plein été et une phase finale portée à 24 équipes. Qui succèdera au Cameroun, sacré en 2017, le 19 juillet ? Les paris sont lancés…
Ça y est, nous y sommes. Plus que quelques heures à patienter avec une grandiose cérémonie au Caire, suivie du match d’ouverture entre les Pharaons d’Egypte et le Zimbabwe, puissance montante d’Afrique australe.
Après de longs mois d’interrogations et de polémiques liées aux retards réels ou supposés du Cameroun, dont on rappelle qu’il avait été chargé d’organiser cette 32e édition avant que la CAF n’opère un « glissement » sur 2021 et ouvre les guichets à un nouveau postulant, voici l’Egypte fin prête à accueillir une CAN dont elle est l’une des favorites naturelles.
Favorite parce que les Pharaons, sous l’impulsion de leur précédent sélectionneur, Hector Cuper, avaient atteint (et perdu 2-1, face au Cameroun) la finale 2017 après sept années d’absence. Ce retour au premier plan avait vu la bande à Mohamed Salah disputer la Coupe du monde en Russie l’été dernier. Mais avec son leader blessé et pas complètement remis, l’Egypte avait traversé le 1er tour comme un zombie et avait perdu ses trois matches.
Aujourd’hui, l’offre de l’Egypte est bien différente : exit le système ultra défensif de Cuper, place à un football qui correspond un peu plus aux qualités naturelles des Salah, Trezeguet et Warda. L’équipe a été parmi celles qui ont marqué le plus dans les éliminatoires (15 buts), et elle a proposé un football plus souriant parce que plus offensif, n’en déplaisent aux ultra-conservateurs et aux pragmatiques. Le Mexicain Aguirre est assisté par Hany Ramzy, six participations à la CAN (victoire en 1998) qui a également conduit les Pharaons en quart de finale des J0 2012 à Londres. Son vécu et sa connaissance des joueurs cadres seront très précieux pour gérer les exigences d’un tournoi disputé chez soi, devant un public très exigeant.
Les Pharaons ont joué deux matches de préparations contre la Tanzanie (1-0) et la Guinée (3-1) qui ont rappelé leur dépendance aux coups de génie de Mo Salah.
L’Egypte paraît aujourd’hui en mesure de boucler son groupe, le A, devant la RD Congo, l’Ouganda et le Zimbabwe, même si elle devra se méfier d’adversaires qui ont nettement progressé. Quelques interrogations subsistent sur l’état de forme de la RDC.
Dans le groupe C, l’Algérie de Djamel Belmadi se présente avec elle aussi de fortes intentions. 68e au classement FIFA, absente de la dernière Coupe du monde, elle devra contester la montée en puissance du Sénégal, grand favori du tournoi et 22e mondial. Ce match, programmé le 27 juin au Caire, sera l’une des affiches attendues du 1er tour.
Les coéquipiers de Riyad Mahrez ne manquent pas de qualités individuelles. On attend beaucoup de Youcef Atal, l’une des révélations de la L1, et on guettera l’adaptation de Andy Delort, fraîchement naturalisé et buteur en préparation contre le Mali (3-2). L’ensemble du groupe a de la gueule. Mais il devra peut-être forcer sa nature contre des sélections très athlétiques et décomplexées comme le Kenya et la Tanzanie. Les respecter et se méfier est impératif. On guettera son entrée dans la CAN dimanche contre le Kenya pour s’assurer des intentions de l’équipe, qui présente le profil d’un outsider au titre qu’elle n’a plus remporté depuis… 1990.
Dans le groupe D, les Lions de l’Atlas n’avancent pas vraiment masqués. Ils font partie de la liste des favoris. Quarts de finaliste en 2017, mondialiste en Russie l’an dernier, les hommes d’Hervé Renard sont arrivés avec la ferme intention d’aller le plus loin possible. Même s’ils ont perdu leurs matches de préparation contre la Gambie (0-1) puis la Zambie (2-3), les effluves de la compétition vont vite les remettre dans la bonne direction.
Les coéquipiers du talentueux Hakim Ziyech, qui va vivre sa première CAN, devront se méfier de la Côte d’Ivoire, qu’ils ont successivement battu à la CAN 2017 (1-0) puis éliminé de la CDM 2018 (2-0 à Abidjan). Ce sera leur 2e match au Caire. Attention également à cette Afrique du Sud emmenée par son binôme offensif Percy Tay-Lebo Mothiba. Hervé Renard, dont ce sera la 6e CAN en tant que numéro un après 2010, 2012 (vainqueur avec la Zambie), 2013, 2015 (vainqueur avec les Ivoiriens) et 2017, se méfie de tout le monde dans cette poule. Clairement, le Maroc ne devrait pas se balader face à des adversaires qui ont tous de bonnes raisons de vouloir le faire trébucher, à l’instar de la Namibie, éliminée (0-2) en quart du dernier CHAN 2018 par le Maroc.
Enfin, les deux derniers représentants du football arabe, qui ne compte qu’un absent dans le tournoi (la Libye), sont regroupés dans le groupe E : la Tunisie et la Mauritanie. Les Aigles de Carthage, dirigés depuis décembre dernier par Alain Giresse, sont dans une bonne dynamique. La qualification fut rapidement bouclée, et les joueurs cadres (Khazri, Sliti, Badri, Sassi) ont derrière eux une participation à la CDM en Russie. L’équipe a livré trois matches de préparation, tous gagnés contre l’Irak (2-0), la Croatie vice-championne du monde (2-1) et le Burundi (2-1).
Le Français Giresse sera-t-il en mesure d’emmener son groupe dans le dernier carré ? La Tunisie ne l’a plus fréquenté depuis le début des années 2000 (4e en 2000, vainqueur chez elle en 2004). Souvent plus à l’aise en éliminatoires que lors du tournoi final, cette équipe qui ne manque pas de talents aura fort à faire avec l’Angola et le Mali pour contester sa qualification pour la phase à élimination directe.
A ses côtés, on va découvrir un nouveau venu dans le concert des nations africaines, la Mauritanie. Jusqu’à présent, les Mourabitounes ne faisaient valoir que deux participations au CHAN (2014, 2018). L’équipe est conduite depuis quatre ans par un Français, Corentin Martins. Sous son impulsion, elle a progressé et battu des nations réputées supérieures comme l’Angola et le Burkina Faso (3e en 2017) qu’elle a d’ailleurs éliminé.
Plus qu’une somme d’individualités, on est en présence d’un groupe solide, avec quelques joueurs de grand talent, qui sont appelés à découvrir la CAN. Seront-ils impressionnés ? S’adapteront-ils vite aux exigences du tournoi ? On espère bien que Hacen el-Id, Ismaël Diakité et Khassa Camara vont se faire un nom sur le plan continental à travers cette CAN.
Sortir du groupe n’est pas impossible, parmi les meilleurs troisièmes, mais cela signifie de prendre des points contre l’Angola, son concurrent. Le Mali et la Tunisie paraissent en effet taillés pour prendre les deux places qui qualifient automatiquement. Voilà, place on l’espère désormais au (beau) jeu et au spectacle, après des semaines agitées dans la coulisse pour le football africain. Que la fête égyptienne soit belle !
@Samir Farasha (avec Fayçal Chehat)