Tout à l’heure à Yaoundé, les champions sortants de l’édition 2018 auront l’opportunité contre le Mali de décrocher un deuxième titre d’affilée. Ce qui constituerait une première dans l’histoire du CHAN. Les Lions de l’Atlas en sont-ils capables ?
Maroc-Mali. Originale, inédite, l’affiche de cette finale de la sixième édition du CHAN est belle. Elle oppose deux formations aux tempéraments et à la personnalité quelque peu différents. Avec 13 buts, le Maroc du coach Houcine Ammouta débarque en finale nanti de certitudes dans son jeu offensif. Avec 5, 3 et 4 buts lors de ses trois dernières rencontres, il ferait peur à n’importe quel adversaire.
Avec Soufiane Rahimi, le meilleur buteur de la compétition (5 réalisations) et Hafidi à la baguette, il donnerait des sueurs froides à tout technicien chargé de l’affronter. Mais peut-être pas le Mali. Les Aigles dirigés par Nouhoum Diané se sont affirmés comme la formation la plus solide défensivement, un bloc difficile à contourner. Seul le Cameroun, lors de la 2e journées, était parvenu à lui inscrire un but. Oui, un seul but encaissé en l’espace de cinq matches de 510 minutes (3 matches de 90 et deux avec prolongation de 120) !
Djigui Diarra, le capitaine et gardien de but malien, fait figure d’épouvantail dans cette compétition, d’autant qu’il a arrêté un tir au but lors de la dernière séance contre la Guinée, celui de Morlaye Sylla, certainement le joueur révélation le plus marquant du CHAN camerounais.
Pour autant, il serait réducteur de faire du Mali une équipe-bloc défensive. Elle a démontré de belles qualités au milieu, ses latéraux sont très offensifs et ses joueurs excentrés (Demba Diallo, Ballo) sont aussi de bons pourvoyeurs de ballons de but. Il lui manque en revanche un vrai buteur. Le Maroc de son côté, s’il a notoirement impressionné depuis la 3e journée et ce 5-2 contre l’Ouganda, a sans doute aussi péché par orgueil. Se sentant supérieur au Togo (1-0) et au Rwanda (0-0), ses deux premières prestations furent sans relief et donc très décevantes, loin de ce que les talents dont il regorge sont capables. Depuis, le collectif s’est réveillé et mis en marche.
Mais ce serait une erreur de se dire que la finale est dans la poche avant que de l’avoir disputée. Le Mali, tactiquement, présente d’autres arguments que les précédents adversaires du Maroc. En particulier son mental fort. Il n’essaie jamais de faire dans le jeu ce dont il n’est pas capable.
Ce qui paraît sûr en revanche, c’est que les Maliens manqueront de fraîcheur à un moment ou un autre de la finale, après avoir dû disputer deux prolongations suivies de séances de tirs au but. Le Maroc, s’il ne parvient pas à marquer rapidement, devra donc faire preuve de patience et fatiguer au maximum une défense par ailleurs privé de l’un de ses atouts, l’axial Mamadou Doumbia, victime d’une double fracture tibia-péroné face à la Guinée.
Le Maroc version 2021 ne paraît pas plus talentueux que ses devanciers de 2018 qui avaient littéralement écrasé la concurrence trois semaines durant. Il est dans la continuité de cette équipe, sans doute aussi parce que sa colonne vertébrale -Zniti-Jabrane-Hafidi-El Kaabi- a déjà vécu pareil tournoi. Aussi parce que le Maroc a pu disputer ses compétitions nationales depuis le début de la pandémie de Covid-19, ce qui n’est pas le cas du Mali.
Quant à Houcine Ammouta, il a eu l’intelligence et la lucidité de modifier quelque peu ses plans et la composition de son équipe après les deux premières journées, pour transformer une équipe bouffie d’orgueil en une formidable machine à jouer, fluide et efficace quand il le fallait. Attention, il lui faut encore aller chercher le titre face au Mali et l’on ne promet pas que ce sera chose aisée face à cet adversaire dont les valeureux aînés emmenés par Sali Keita, en 1972 et dans ce même stade, avaient perdu en finale de la CAN face aux diables rouges du Congo.
Quarante-neuf ans plus tard, le Mali – finaliste du CHAN 2016 tout de même, éreinté 3-0 par la RDC – se donne l’occasion de remporter enfin un premier titre continental. Le CHAN n’est certes pas la CAN mais il viendrait récompenser le travail des clubs maliens, qui forment et mettent à disposition leurs meilleurs éléments pour ce tournoi. Le Maroc peut dire de même puisqu’il délègue les meilleurs joueurs de sa Botola, un championnat prisé par les joueurs étrangers au passage qui y trouvent une compétition de qualité pour progresser. Alors, Maroc ou Mali ? Réponse en fin de soirée…
@Samir Farasha