Le transfert arabe du mercato hivernal. Pour étoffer son milieu de terrain, Arsène Wenger a engagé il y a quelques jours Mohamed Elneny, un Pharaon qui monte, qui monte. Portrait de ce jeune joueur passé lui aussi par le FC Bâle, comme un certain Mohamed Salah, avant de rejoindre la Premier League anglaise.
Pour la recrue des Gunners, née en 1992 à Mehalla, une grande ville du centre du delta du Nil située dans le gouvernorat de Gharbeya, tout a commencé du côté des catégories de jeunes du Ahly, grand réservoir de talents du pays. A seize ans pourtant, Mohamed change d’orientation : il prend la direction de l’Arab Contractors (Al Moqaouloun Al-Arab), une formation de l’élite certes mais bien moins cotée que le Ahly, où il est amené à fréquenter un autre jeune prospect, Mohamed Salah. La saison 2010-2011 le voit émerger au sein de l’équipe première, où il ne tarde pas à gagner énormément de temps de jeu. Convoqué en sélection nationale U20, il participe grandement au parcours de l’Égypte en Coupe du monde de football qui se déroule en Colombie. Deuxième de leur poule à égalité de points avec le Brésil, les jeunes Pharaons, parmi lesquels son copain Mohamed Salah, sont éliminés au tour suivant par l’Argentine (2-1).
Après le drame de Port Saïd, le 2 février 2012, Elneny voit son temps de jeu considérablement s’amenuiser : le championnat est dans un premier temps neutralisé avant que la fédération ne décide d’annuler purement et simplement le restant de la saison. Le jeune et talentueux milieu de terrain va cependant continuer à garder le rythme, grâce à l’équipe nationale. Bob Bradley, le sélectionneur américain des A, ainsi que Hani Ramzy, le boss des U23, qualifiés pour le tournoi olympique de Londres, lui font confiance. Lors du tournoi, il dispute les quatre rencontres des jeunes Pharaons, qui se hissent en huitièmes de finale avant d’être éliminés par le Japon.
Le tournant suisse
Début décembre 2012, le FC Bâle –qui a déjà recruté Salah et n’a cessé de l’observer – lui propose un stage d’essai d’une semaine. Le 29 janvier 2013, Elneny est prêté pour six mois avec option d’achat. Murat Yakin, le coach de Bâle, n’a pas eu besoin de bien longtemps pour comprendre que le joueur pouvait apporter quelque chose à l’entrejeu des champions suisses. Ses débuts se font tout en douceur : d’abord remplaçant, il gagne peu à peu du temps de jeu. A peine intégré, Elneny remporte le championnat (15 matches, dont 8 titularisations). Début mai 2013, il s’engage pour quatre ans avec Bâle. La saison 2013-14 lui permet d’étoffer son maigre palmarès d’un titre supplémentaire, le championnat, puisque Bâle, finaliste de la Coupe, s’est incliné contre Zurich (2-0). Le Pharaon a disputé 32 matches (25 titularisations) en D1 et inscrit son tout premier but en championnat. Il est également apparu lors de douze matches européens. La saison passée voit Elneny devenir un cadre du FC Bâle (28 matches, 2 buts), avec encore un titre de champion, avec Paulo Sousa, le nouvel entraîneur. La saison 2015-16 promettait évidemment de nouveaux honneurs pour le robuste milieu axial défensif égyptien, qui s’est imposé en sélection autant qu’il est devenu un pilier en club. Et puis, l’offre d’Arsenal est arrivée…
En route pour la Premier League
C’est un joueur rompu aux duels rugueux du milieu de terrain et surtout aux joutes de la Ligue des champions qu’Arsène Wenger a décidé de recruter le 14 janvier. Elneny, qui portera le numéro 35 chez les Gunners, sera-t-il le Yaya Touré des Londoniens ? Il en a le potentiel, quand bien même il marque très peu (2 buts quand même en championnat suisse avant son transfert) car il tente peu souvent sa chance. Pour autant, le jeune Egyptien va devoir travailler encore plus dur pour devenir un titulaire à part entière à Arsenal, notamment sur la qualité de ses passes, mais Wenger devrait lui permettre d’améliorer ce secteur. L’Egypte toute entière, qui a fini par s’enticher de ce joueur tout autant que de son ami Mohamed Salah, espère évidemment qu’il ne connaîtra pas un destin similaire à celui de Salah. Arrivé à Chelsea en provenance de Bâle, il n’a jamais réellement eu sa chance sous Mourinho et c’est en Italie qu’il a explosé. De même, on ne lui souhaite pas de démarrer trop vite à la manière du fantasque Amr Zaki (10 buts pour Wigan à mi-parcours) avant de disparaître. Mais le jeune Pharaon a la tête sur les épaules, et paraît promis à une carrière anglaise comme Ahmed El Mohammadi, latéral droit qui s’est imposé à Sunderland puis à Hull depuis 2010.
Hector Cuper, le sélectionneur de l’Egypte, devrait lui aussi profiter pleinement de ce transfert : grâce à cette arrivée en Angleterre, El Nenni va encore étoffer son registre, déjà important en équipe nationale en terme de volume de jeu. Autre intérêt, Elneny va encore gagner des galons dans le vestiaire, et soulager sans doute un peu son ami Mohamed Salah, considéré depuis près de trois ans comme le nouveau boss de la sélection. Dans tous les cas de figure, c’est évidemment une excellente nouvelle pour un football égyptien et une sélection qui sont appelés à reprendre leur place légitime dans le concert des nations africaines et arabes, c’est à dire dans le haut du panier. La génération des Ahmed Hassan et Aboutreika a trouvé ses successeurs, et l’histoire, qui s’était arrêtée en route pour l’Egypte après 2010, devrait redémarrer de plus belle avec l’émergence et la confirmation du talent d’Elneny.
@Samir Farasha