La fédération algérienne de football et Milovan Rajevac ont décidé d’un commun accord de mettre fin à leur collaboration, ce mardi 11 octobre. Le Serbe quitte donc les Fennecs, sous la pression des joueurs, après seulement trois mois passés à la tête de la sélection et un bilan d’une victoire et d’un match nul, en deux matches. En l’espace de cinq mois, c’est la seconde démission d’un sélectionneur après celle de Christian Gourcuff en avril dernier.
Fennecs – Rajevac: cohabitation impossible?
Si les joueurs algériens ont oublié d’être les valeureux soldats que tout un peuple attendait dimanche soir face aux Lions Indomptables du Cameroun (1-1), lors du premier match des éliminatoires pour la coupe du monde 2018 en Russie, ils ont revanche bien réussi le « putsch » qui a incité le président de la Fédération algérienne de football (FAF) à démettre Milovan Rajevac de ses fonctions d’entraineur principal. L’altercation musclée entre les cadres de l’équipe et le coach à l’issue de la rencontre, dans l’intimité des vestiaires du stade Mustapha Tchaker, aura été fatale au Serbe. Les cadres de l’équipe se seraient ainsi plaints auprès de Mohamed Raouraoua de la mauvaise communication du sélectionneur et de certains de ses choix dans le onze de départ face aux Camerounais.Griefs qui auraient rendu impossible une cohabitation durable. Les « mutins » auront donc obtenu gain de cause auprès du premier responsable du football national qui a préféré sacrifier l’homme qu’il fît venir au début de l’été plutôt que de laisser couver une bouillonnante cocotte qui aurait fini tôt ou tard par provoquer des dégâts insoupçonnés.
Sélectionneur 4G, Milovan Rajevac sera resté en tout et pour tout 108 jours à la tête de la meilleure nation africaine. Il avait succédé, le 26 juin 2016, à Christian Gourcuff qui justifia la démission de son poste d’entraineur en avril dernier par l’environnement malsain qui entoure la sélection (« le football est pris en otage », déclarait-il au journal l’Equipe). Le natif de Cajetina (ex-Yougoslavie) n’aura donc pas eu le temps de se familiariser et de comprendre toutes les subtilités du football local. On ne saura finalement jamais si ce choix de la FAF aurait pu être le bon sur la durée. Ce dont on est sûr, par contre, c’est que le bilan du désormais ex-sélectionneur de l’Algérie, même s’il est difficile à juger, aura été mathématiquement positif : une large et probante victoire face au Lesotho (6-0), et ce match nul face au Cameroun. On pourra toujours rétorquer que le technicien de 62 ans n’a apporté aucune innovation technico-tactique ou qu’il a reconduit le même groupe que ses prédécesseurs (Gourcuff et le duo intérimaire Neghiz-Mansouri), il n’en demeure pas moins que les résultats ne sont pas si catastrophiques, au niveau comptable,pour un homme qui a eu peu de temps pour prendre ses marques.
Gourcuff et Rajvac: erreur de casting ?
La séparation dite à l’amiable entre les deux parties doit-elle occulter la mauvaise gestion des deux sélectionneurs nationaux, depuis la fin de la Coupe du monde, par Mohamed Raouraoua? La question mérite d’être soulevée tant le choix de Christian Gourcuff – officialisé en avril 2014 – qui n’avait jamais dirigé une sélection et qui ignorait tout du contexte africain, aurait pu être une bonne idée si on avait su le protéger du contexte particulier qui enveloppe l’équipe nationale. Malheureusement pour tous les supporters algériens, c’est au moment où le technicien français commençait à prendre la dimension de la fonction, et à proposer une véritable identité de jeu sur le rectangle vert, après un long tâtonnement d’une bonne année, qu’il a décidé de jeter l’éponge et de regagner sa Bretagne natale. Son successeur était donc attendu avec impatience. La nomination estivale de Milovan Rajevac avait quelque peu surpris, et douché froidement, l’ensemble du public. Les fans espéraient une pointure dans le domaine plutôt qu’un entraineur à l’anonymat avéré. Bien que le Serbe ait obtenu des résultats convaincants avec la sélection ghanéenne – finaliste de la CAN 2010 et quart de finale de la coupe du monde 2010 -, on pouvait subodorer que son manque de charisme et que sa non pratique de la langue de Molière auraient pu le desservir, tôt ou tard, face à des joueurs stars habitués à côtoyer, et à respecter, le gratin du coaching mondial. La suite, on la connait avec ce renvoi expéditif impulsée par une révolte interne.
Un blessé rattrapé par le col
Après le travail titanesque effectué par Vahid Halilhodzic durant ses trois années à la tête d’El Khadra, l’Algérie s’étant hissée sur le toit du football continental tout en se qualifiant pour la première fois de son histoire à un huitième de finale de coupe du monde, les amoureux des Fennecs étaient légitimement en droit d’attendre un candidat, en remplacement du Bosnien, rompu au haut niveau international. Pour continuer à faire progresser cette talentueuse génération de joueurs, qui fait les beaux jours des meilleurs championnats d’Europe, et pour franchir encore un cap lors des prochaines éditions du mondial.Contrairement à nombre de ses homologues africains, l’Algérie, grâce à un confortable trésor de guerre de plusieurs dizaines de millions d’euros, peut se targuer de s’auto-suffire financièrement. Elle peut dès lors se payer les services d’un entraineur de renommée internationale. C’est à ce prix que les Vert et Blanc, qui n’ont pas encore exploité tout leur potentiel, continueront de grandir et de convaincre des éléments de qualité, principalement formés sur le territoire européen, de rejoindre les rangs de la sélection.
Dans cette période d’instabilité que connait l’équipe nationale, on peut espérer que le début d’hémorragie a été stoppée à temps avec la démission de Milovan Rajevac. Avec seulement un match de joué dans le groupe B, l’objectif historique d’une troisième participation d’affilée à une coupe du monde reste largement à la portée des coéquipiers d’Islam Slimani. Il faudra pour cela ramener un résultat positif du périlleux déplacement nigérian du 12 novembre prochain, avec ou sans le duo d’intérimaires Neghiz-Mansouri, et surtout de ne pas se tromper sur le profil du futur récipiendaire du poste de sélectionneur. Il en va de la survie des Fennecs, et d’une partie des rêves du peuple algérien….
@ Mansour Fodil