L’invité VIP . Fraîchement nommé à la tête du club égyptien d’IsmaÏli, le technicien français est arrivé avec une méthodologie, une approche qui a fait ses preuves partout où il est passé. Son objectif cette saison est double : faire remonter le club au classement et aller le plus loin possible en Coupe arabe.
« Didier Gomes bonjour ! Après le Rwanda, le Cameroun, l’Algérie, l’Ethiopie et la Guinée, vous atterrissez dans un sixième championnat sur le continent africain : l’Egypte…
En effet, c’est un sixième football à découvrir et sûrement l’un des tout meilleurs sur ce continent, avec des équipes qui tiennent le haut du tableau sur le plan africain. Je suis très honoré d’avoir pu éveiller l’intérêt et la confiance de ce grand club, Ismaïli Sporting Club. Un club historique puisqu’il a été le premier en Afrique du Nord à remporter la Coupe des clubs champions en 1969 et un très fort soutien populaire. C’est un véritable challenge pour moi que d’essayer de le faire remonter au classement.
Imaginiez-vous un jour travailler en Egypte ?
Quelques années après avoir remporté ce premier titre au plan personnel en 2013 au Rwanda avec Rayon Sport, je me retrouve à la tête de ce géant égyptien ! C’est beaucoup de satisfaction mais il faut maintenant assumer les responsabilités. Les objectifs fixés par le club sont élevés. A commencer par retrouver une place convenable dans le championnat. Pour l’instant l’équipe est à la traîne mais elle a du potentiel. Et puis il y a la Coupe Arabe qui se présente à nous d’ici quelques jours, dans laquelle on doit aller chercher une qualification pour poursuivre notre beau parcours.
Etes-vous inquiet par rapport au challenge immédiat fixé ?
Je me dois d’assumer vite les responsabilités. On s’est mis au travail immédiatement pour faire progresser ce groupe de joueurs plutôt jeune par rapport à ce qui se fait normalement en Egypte. C’est un groupe à fort potentiel qui reste concentré sur le travail au quotidien. Des résultats immédiats sont requis. On a commencé par une victoire (2-1) contre El-Geish, ce qui est bon pour la confiance. La durée de vie d’un coach reste limitée au Maghreb mais aussi un peu partout sur le continent, si les résultats ne suivent pas, évidemment !
Quelle est votre philosophie ?
Je débarque avec mes convictions, ma façon de mettre les choses en place. Je ne me pose pas plus de questions que ça. Je connais les attentes du Board et de nos très très nombreux et bouillants supporters. A nous d’être concentré pour faire progresser cette équipe. Ensuite, on espère vraiment avoir de bons résultats, produire un jeu plus en conformité avec ce que l’équipe peut produire. Et à partir de là, foncer dans la compétition sans aucun état d’âme ! Je me mets en place dans un club qui est très professionnel, très entouré par un staff technique compétent et acharné dans le travail. On se connaît à peine mais la communication passe très bien. Ce qui est impressionnant dans ce club, c’est que tout le monde est au travail. On vit dans une résidence bâtie dans le stade. Ici, on sent les gens prêts à donner le meilleur d’eux-mêmes. C’est vraiment intéressant en termes de conditions de travail. Je suis vraiment impressionné.
Dans quelles conditions matérielles travaillez-vous au quotidien ?
Rien n’est laissé au hasard, tout est mis à ma disposition, au niveau des logiciels, de l’analyse vidéo, des terrains d’entrainement et du matériel. On s’entraine avec la puce GPS pour recueillir des données sur chacun. Je suis très surpris d’avoir tant de personnes qui font en sorte que j’évolue le mieux possible. Vous connaissez un peu mon parcours. J’aime ces challenges où il faut donner une dynamique à une équipe qui n’est pas très bien en place. Où il faut apporter un vrai impact. Ismaïli a connu un début de saison compliqué, alternant bon et moins bon. On doit être plus conquérant sur l’aire de jeu. Il me semble que les choses évoluent positivement depuis qu’on est là. Mais seuls les résultats apporteront la preuve de notre bon travail.
Même si ce n’est ni le Ahly, ni le Zamalek, Ismaïli demeure un grand d’Egypte. Avec certainement une pression importante sur vos épaules, non ?
Je suis à la tête d’un groupe plutôt jeune, qui a forcément besoin de confiance pour évoluer positivement et progresser. Oui, c’est un club à forte pression. On a besoin d’aider nos jeunes à s’exprimer le mieux possible. A nous de prendre la pression sur nous même pour les en délester. Il faut travailler dans ce sens avec des joueurs amenés à avoir un très avenir. Au-delà de la confiance qu’on doit susciter chez nos joueurs, on doit surtout dégager une véritable identité sur le terrain. On travaille aussi dans ce sens-là au travers de séquences vidéo pour expliquer aux joueurs ce que l’on attend d’eux, quel jeu on souhaite développer. J’aime avoir le contrôle du ballon, pas forcément sur des phases très longues. On doit progresser dans ce sens, on manque encore de patience, on se projette trop vite vers l’avant. L’équipe n’avance pas assez ensemble vers le but adverse.
Comment les joueurs ont-ils réagi à votre arrivée sur le banc ?
Les joueurs ont bien compris ce que l’on attend d’eux. Ce travail nécessite quelques semaines pour produire ses effets. Après quelques séances d’entraînement, je sens un groupe attentif et très discipliné. Les choses évoluent dans le bon sens.
Ismaïli compte deux étrangers, Shilongo et Piqueti, le « DJurtu » bissau-guinéen héros de la CAN 2017. Sont-ce des éléments importants ?
En effet, on compte dans notre groupe un Namibien, Benson Shilongo. Après un passage à vide en début de saison, il s’est vite remis au travail. Il a fait une belle saison l’an passé en marquant et en faisant marquer. Il a envie de retrouver ça. C’est un joueur puissant et intelligent dans ses déplacements. Nous avons aussi l’international de la Guinée Bissau Piqueti, un joueur très agréable qui aime le ballon, on le voit chaque jour à l’entraînement. Il allie vitesse de course et de dribble. Il manque un peu de coordination dans ses gestes techniques pour être plus fort mais il a une marge de progression intéressante.
Vous êtes réputé depuis quelques années pour votre faculté à promouvoir en équipe pro les jeunes. Sera-ce encore le cas à Ismaïli ?
La promotion des jeunes est quelque chose qui me tient à cœur, je l’ai toujours fait, notamment au Cameroun avec le Cotonsport et à l’Ethiopian Bunna. Je crois qu’il est nécessaire de promouvoir les jeunes petit à petit. Ca permet de dynamiser la concurrence. J’’ai un groupe de 23 ans de moyenne d’âge. J’ai aligné sept moins de 24 ans lors de mon premier match, le plus âgé a 29 ans. Vraiment c’est un profil d’équipe qui me convient bien avec des jeunes de 19 à 24 ans qui ont besoin d’être encore formés.
En quoi travailler avec les jeunes est-il si important pour vous ?
C’est sûrement un paramètre primordial dans cette envie que j’avais de rejoindre Ismaïli. C’est toujours très passionnant et vivifiant avec des joueurs en attente de conseils et de progression. Le groupe va progresser à vitesse grand V. Peut-être que cette année ce sera difficile de se projeter sur le haut de tableau. Mais on doit pouvoir aborder la prochaine saison avec un effectif plus expérimenté. Il y aura beaucoup plus à jouer.
Votre prochaine échéance, c’est la Coupe arabe avec un quart de finale retour…
Dans ces grands clubs, il y a des obligations de résultats. Cette Coupe arabe est par conséquent un cap à franchir pour tous. L’objectif est d’aller chercher la finale. A nous de passer déjà ce quart avec un match retour contre Al-Ittihad qu’on a battu à l’aller à Alexandrie 1-0. Un résultat positif en vue du match retour le 24. Mais Ittihad est une bonne équipe égyptienne. Il faudra rester concentrés, faire plus et mieux. Ce sera le leitmotiv.
Tous ceux qui sont passés par Ismaïli évoquent une ville folle de foot et de son club. Vous confirmez ce ressenti ?
Dès que vous mettez les pieds à Ismaïlia, on sent qu’on arrive dans un très grand club avec une ville derrière son équipe. Les installations sont excellentes avec un centre de vie, des bureaux bâtis à l’intérieur du stade. Les terrains d’entraînement sont également très bien entretenus. Ca change de conditions que j’ai pu connaître par le passé ! »
Propos recueillis par @Samir Farasha