Nous poursuivons notre série consacrée aux joueurs entrés dans l’histoire de leur club ou de leur sélection à l’issue d’un match historique. Après l’Aigle de Carthage Ziad Jaziri, le Lion de l’Atlas Salaheddine Bassir et le Fennec Rabah Madjer, place à l’inoubliable Saoudien Saïd Al-Owairan , qui éclaira de ses exploits la Coupe du monde 1994 aux Etats-Unis.
L’AVANT-MATCH. Né à Riyadh en 1967, Saïd Al-Owairan est l’enfant d’un seul club, le Shabab Il y passera d’ailleurs l’intégralité de sa carrière. Formé dans ce club, il s’y découvre d’évidentes qualités de milieu offensif et de buteur. A 21 ans, il rejoint l’équipe nationale A saoudienne. Vainqueur l’année suivante de son premier trophée, la Coupe nationale, Al-Owairan remporte trois championnats nationaux au début des années 1990 (1991, 1992, 1993). Il dispute donc la Ligue des champions asiatique 1993, qui voit le Shabab se frayer un chemin jusqu’en finale. Opposé aux Iraniens du PAS Téhéran, Al-Owairan et ses coéquipiers cèdent de justesse (1-0). L’année suivante, Al-Owairan fait partie de l’équipe nationale appelée à disputer la Coupe du monde 1994 aux Etats-Unis. Le Saoudien a pris une part prépondérante dans ce parcours puisqu’il a inscrit 7 buts lors des éliminatoires. Il est donc attendu en terre américaine même si le tirage au sort propose un groupe relevé avec les Pays-Bas, la Belgique et le Maroc. Rien qui n’effraie cependant ce joueur talentueux…
LE MATCH. Aligné d’entrée avec son numéro 10 dans le dos lors du match inaugural contre les Pays-Bas, Al-Owairan voit son pays ouvrir la marque par Anwar, avant d’être doublé puis battu de justesse (2-1). Les Saoudiens ont fait bonne impression à Washington, une bonne impression confirmée cinq jours plus tard face au Maroc (2-1) avec la manœuvre dans l’entrejeu Al-Owairan. Ce dernier va attendre le dernier match pour écrire la plus belle page de sa carrière. Quatre jours après le succès sur les Lions de l’Atlas, l’Arabie saoudite peut s’assurer un passage en huitièmes, en cas de victoire sur la Belgique.
Cet instant magique se produit après à peine quatre minutes de jeu.Les Saoudiens récupèrent un ballon à l’entrée de leur surface de réparation, immédiatement transmi à Al-Owairan. Il accélère ballon au pied jusqu’au rond central et grille la politesse à deux « Diables Rouges » qui ont tenté de le prendre en tenaille. Résistant à cette pression et continuant d’accélérer, il met par terre un autre adversaire et entre dans la surface de réparation côté droit. Alors qu’un dernier défenseur et le gardien de but Michel Preud’Homme se jettent sur lui, il résiste une dernière fois, et frappe -tout en glissant- du pied droit. Le ballon se niche dans la lucarne opposée des Belges ! Coup de tonnerre à Washington, d’autant que les Saoudiens vont s’accrocher à ce résultat (1-0) qui leur permet de terminer avec six points à égalité derrière les Pays-Bas et devant la Belgique (6 points). Un exploit exceptionnel pour cette formation habituée à régner sur le football asiatique dans les années 1980, et qui a proposé un football offensif sous la conduite de l’Argentin Jorge Solari. L’épopée des Verts et d’Al-Owairan se terminera quelques jours plus tard devant la Suède (1-3) en huitièmes. Qu’importe puisque le joueur verra son but se classer 6e but du Siècle selon la FIFA.
L’APRÈS. De retour à Al-Shabab après la Coupe du monde, le statut d’Al-Owairan va quelque peu changer. Il est élu meilleur joueur asiatique de l’année par l’AFC et quelques clubs européens se rapprochent de lui. Mais une loi restrictive en vigueur au pays l’empêche de quitter le championnat. Le « Maradon » saoudien ne va pourtant jamais retrouver ce niveau d’excellence. En 1998, il revient en Coupe du monde mais ne prend part qu’à deux matches. Ses meilleurs jours sont déjà derrière lui. Deux ans plus tôt, la police saoudienne l’a surpris en train de boire de l’alcool et discuter avec des femmes en plein Ramadan, ce qui entraîne sa suspension durant un an et un emprisonnement de quelques mois… Après sa derrière apparition en sélection (1998), il remportera la Coupe asiatique des vainqueurs de Coupe (2001), son dernier titre, à 34 ans. Il met un terme à sa carrière professionnelle cette même année. A 52 ans, il demeure évidemment une icône nationale et arabe : comment oublier son slalom de près de 70 mètres qui a mis sur les fesses six joueurs belges ? Il serait devenu consultant à la télévision depuis sa retraite, qu’il coule paisiblement dans son pays.
@Samir Farasha