A partir d’aujourd’hui, 2022mag consacre une série aux grands techniciens arabes d’hier et d’aujourd’hui. Nous débutons par le multi-titré Shehata, ancien grand attaquant égyptien devenu le « Maalem », artisan des trois dernières victoires des Pharaons à la CAN.
Crinière poivre et sel, moustache fournie assortie à sa tignasse, sa silhouette arrondie et imposante aura marqué l’histoire récente de la Coupe d’Afrique des Nations et surtout, du football égyptien. Né en 1947, Hassan Shehata a d’abord été un excellent footballeur entre 1967 et 1983, essentiellement du côté du Zamalek, le club de sa vie. Cinq cent matches environ disputés sous la tunique blanche et rayée de rouge des Chevaliers Blancs cairotes et trois participations à la CAN (1974, 1976, 1980), une compétition qu’il aime, et qui va compter dans son parcours.
Quand il met fin à sa carrière active, Shehata est immédiatement placé à la tête des U20 (juniors comme on dit à l’époque) où il va commencer à apprendre le métier deux saisons durant. Il devient ensuite le bras droit du Yougoslave Dusan Nenkovic durant la saison 1985-86, toujours au Zamalek. Une saison sans trophée. Dans la foulée, Shehata opte pour l’expatriation afin d’exercer pour la première fois en tant que numéro un. Deux saisons à Al-Wasl (Emirats) puis une au El-Merreikh, chez le voisin soudanais. De retour en Egypte en 1990, Shehata continue de faire le tour des clubs, dans un contexte de grande instabilité sur le plan technique. En Egypte plus qu’ailleurs, on renvoie facilement celui qui n’obtient pas les résultats escomptés, quel que soit son pedigree d’ancien grand joueur. Dix ans après son premier passage sur le banc technique zamalkaoui, Shehata accepte finalement de revenir… toujours comme adjoint (1995-96), aux côtés de l’Allemand Werner Olk. C’est la saison de la victoire en Coupe d’Afrique des Clubs champions, la dernière sous sa forme ancienne avant la création de la Ligue des champions.
Après une saison chez le géant cairote, Shehata reprend son baluchon et la route. Il poursuit trois saisons durant son tour d’Egypte des clubs, souvent modestes. 1999 le voit franchir de nouveau une frontière, celle de la Libye, pour prêter main forte au Ahly de Benghazi. Une expérience de courte durée. En 2000, il s’arrête à Suez puis cède de nouveau aux pétrodollars émiratis, du côté de Fujairah. En 2001, au lendemain d’une CDM U20 très réussie pour le football égyptien (demi-finaliste en Argentine), Hassan Shehata succède à Shawki Gharib sur le banc des jeunes Pharaons, jusqu’en 2003. Une bien belle opportunité qui lui permet de repérer les jeunes talents du football local. Il qualifie d’ailleurs l’Egypte pour la CDM U20 (2003) après avoir remporté la CAN de la catégorie, avec un groupe qui comprend des futures stars, Ahmed Fathi, Hosni Abd Rabo et Emad Meteab. Même si la sélection ne va pas bien loin, elle aura permis à Shehata de démontrer son savoir-faire.
Les Arab Contractors sont tout heureux de récupérer ce technicien désormais âgé de 56 ans durant une saison. Début 2005, la Fédération égyptienne (EFA) décide de se séparer de l’Italien Marco Tardelli, dont les performances à la tête des Pharaons n’ont guère impressionné. Pour lui succéder, on fait appel à un homme neuf puisqu’il n’a jamais fait partie des staffs précédents : Shehata. L’Egypte a raté sa CAN 2004 en Tunisie sous la direction de Mohsen Saleh. Elimination dès le 1er tour. Le football égyptien craint un nouvel échec à l’occasion de la CAN 2006 dont l’organisation lui a été confiée.
Shehata, en père peinard, présente son plan d’action. A ses côtés, l’inamovible Shawki Gharib, un autre ancien grand joueur. Le nouveau sélectionneur s’appuiera sur des joueurs expérimentés (El-Hadary, El-Saqqa, Hossam Hassan, Ahmed Hassan, Wael Gomaa) et une jeune garde qu’il connait bien (Ahmed Fathi, Abd Rabo, Mido, Amr Zaki, Abdel Wahab). C’est cet alliage, fait de jeunesse et d’expérience, qui va offrir à l’Egypte son premier sacre depuis 1998, en battant la Côte d’Ivoire de Drogba aux tirs au but.
Shehata rééditera la même performance au Ghana en 2008, en s’imposant de justesse aux dépens du Cameroun (1-0). Deux ans plus tard en Angola, le Maalem réussit la passe de trois face cette fois à une jeune équipe du Ghana. Trois succès en autant de participations, Shehata est le coach en or du football égyptien. Il quittera la sélection en 2011, sans l’avoir jamais qualifié pour une Coupe du monde, avec notamment l’échec lors du barrage 2009 contre l’Algérie à Omdurman…
Ayant passé près de sept ans avec les Pharaons, son règne est le plus long d’un technicien auprès de la sélection. Il retourne immédiatement au Zamalek (2011) où pour la première fois de sa carrière, on lui confie le poste de numéro un ! La dernière partie de sa carrière est plus anonyme : Al-Arabi au Qatar, puis le Difaa El-Jadida au Maroc. Il revient en Egypte en 2014 (Arab COntractors, Petrojet) mais ses belles années sont définitivement derrière lui. Il est, avec le défunt Mahmoud El-Gohari, le technicien égyptien contemporain le plus titré sur le plan international. Agé de 70 ans, il n’a plus coaché depuis près de deux ans mais demeure une icône dans le football arabe et égyptien. Son nom a d’ailleurs circulé, pas plus tard qu’en février, pour reprendre l’Etoile du Sahel. Comme il avait circulé après le terrible échec (élimination en huitième) des Pharaons à la CAN 2019 l’été dernier, pour succéder à Aguirre…
@Samir Farasha
Demain, retrouvez le 2e épisode de la série, qui sera consacré à l’Algérien Rachid Mekhloufi.