2022mag consacre depuis quelques jours une série aux grands techniciens arabes d’hier et d’aujourd’hui. Après Hassan Shehata, Rachid Mekhloufi, M’rad Mahjoub, Lhoussine Ammouta et Rabah Saâdane, intéressons-nous aujourd’hui à l’Egyptien El-Gohary, premier homme titré sur le terrain puis sur le banc en Coupe d’Afrique des Nations.
D’abord, et avant toute chose, Gohary, c’est une silhouette fine, le clope au bec. Fumeur invétéré, le regard tantôt rieur, tantôt fermé. Avant d’entrer dans la carrière de coach, le Cairote est avant tout un formidable footballeur et redoutable attaquant. A 17 ans, il est aligné par le Ahly du Caire. A 20, le voilà international A. En 1959, il est le grand artisan de la victoire des Pharaons lors de la 2e édition de la CAN, dont il termine meilleur buteur. En 1960, il participe aussi au tournoi olympique de Rome. Hélas, une blessure au genou va avoir raison de ce joueur aussi redoutable que redouté. En 1961, à 23 ans seulement, il tire sa révérence et met fin à sa carrière. Quatre ans plus tard, il devient entraîneur adjoint au Ahly pendant douze ans. En 1977, à 39 ans, Gohary s’offre une escapade en Arabie saoudite où il devient le bras droit de l’Allemand Dettmar Cramer à l’Ittihad Jeddah.
Au bout de quatre ans, le club saoudien lui confie la succession de Cramer (1981-82) l’espace d’une saison seulement. C’est ensuite le retour au Ahly, son club de cœur. Il remporte deux Coupes nationales et la C1 1982, dont il sera finaliste l’année suivante. Il surfe ensuite sur ces titres et rejoint Al-Sharjah (Emirats) un an avant de revenir au Ahly. Bilan : vainqueur du championnat et victoire en Coupe des coupes (1986). De nouveau, c’est l’étranger qui lui ouvre les bras. Retour donc en Arabie saoudite, au Ahly Jeddah jusqu’en 1988. Il revient ensuite au pays pour prendre pour la première fois la direction des Pharaons où il succède au Britannique Michael Smith.
L’Egypte se qualifie pour le Mondial 1990 en Italie et dispute également la CAN 90 en Algérie, où elle a envoyé une équipe B que ne dirige pas Gohary. Celui-ci veut protéger son effectif, avec les jumeux Hassan (Hossam et Ahmed), Hany Ramzy et encore Magdi Abdelghani, sans oublier le gardien Ahmed Shoubeir, tous des grands noms. En CDM, l’Egypte n’est pas ridicule : nuls contre les Pays-Bas (1-1) et l’Irlande (0-0) et courte défaite contre l’Angleterre (0-1). Mais elle est verrouillée sur le plan offensif. La CAN 1992 au Sénégal sonne la fin de la récréation : les Pharaons sont éliminés d’entrée. 1993 : Gohary retourne en club mais pas au Ahly, sa maison. Infidèle, il choisit le Zamalek avec lequel il remporte la C1 1993 et la Supercoupe d’Afrique. Ce sera ensuite Al-Wahda (1995-96) aux Emirats pour un titre de champion et la sélection d’Oman, brièvement.
Mais les Pharaons ont besoin de lui, surtout après les échecs successifs en CAN (1994, 1996) et en éliminatoires de la CDM. Rappelé sur le banc courant 1997, il qualifie son équipe pour la CAN 98… qu’il va remporter au Burkina Faso face à l’Afrique du Sud mondialiste. Il devient de fait le tout premier homme à avoir remporté la CAN comme joueur puis comme sélectionneur, et sera bientôt imité par le Nigérian Stephen Keshi.
Après ce passage glorieux sur le banc des Pharaons (CAN 98), il est remplacé par le Français Gérard Gili mais revient une dernière fois entre 2000 et 2002. Sans beaucoup de réussite pour les Pharaons puisqu’il est éliminé en quart de la CAN 2002 au Mali par le Cameroun. Gohary quitte alors l’Egypte pour de bon. Direction la Jordanie en 2001. Le Royaume se qualifie pour la première fois de son histoire pour la Coupe d’Asie des Nations en 2004, dont il atteint les quarts de finale. Il assure les commandes de la sélection jusqu’en 2007. A 69 ans, il prend enfin sa retraite des bancs et devient conseiller technique de la fédération, qu’il aide à se professionnaliser. C’est là-bas, à Amman, qu’il décède en 2012 à 74 ans. Il est entré dans le panthéon des meilleurs techniciens du football arabe, après avoir remporté des titres dans son pays, sur le continent africain et dans le Golfe. Son fait de gloire restera la conquête de la CAN 1998 avec un super groupe de joueurs qui ne fut battu que par le Maroc (1-0, 1er tour) dans cette édition.
@Samir Farasha
La série se poursuivra demain avec le technicien tunisien Faouzi Benzarti.