2022mag consacre depuis deux semaines une série aux grands techniciens arabes d’hier et d’aujourd’hui. Après Hassan Shehata, Rachid Mekhloufi, M’rad Mahjoub, Lhoussine Ammouta, Rabah Saâdane, Mahmoud El-Gohary et Faouzi Benzarti, place aujourd’hui au grand formateur marocain Nasser Larguet.
Il a la particularité de n’avoir remporté aucun titre majeur. Et pourtant, nous à 2022mag, le considérons comme un grand technicien du football arabe. Après tout, détecter et former des talents est une tâche qui ne manque pas de noblesse, quand bien même elle manque de visibilité. Quoi que…
Né à Ben Slimane (Maroc) en 1958, Nasser Larguet n’a pas connu une carrière de joueur professionnel. De 1980 à 1989, il joue à l’US Normande (D4) avant de cumuler le poste d’entraîneur-joueur à l’ES Thury-Harcourt en Basse-Normandie, un club amateur. Larguet s’est installé en France juste après le bac pour y conduire des études de pharmacie et y décrocher une licence de microbiologie. Mais le football, sa passion, va donner une autre tournure à son destin.
A partir de 1991, sa réputation grandissante va l’entraîner vers le monde pro. Il est nommé adjoint de Daniel Zorzetto au FC Rouen avant de devenir directeur du centre (1991-95) alors que le club évolue en D2. C’est là-bas, en Seine Maritime, qu’il effectue ses gammes. L’Algérien Omar Belbey fera partie de ses premiers « élèves » promus.
Après le dépôt de bilan de Rouen en 1995, il rejoint l’AS Cannes alors que Rennes lorgne sur lui. Après un premier cycle de trois ans, il répond à l’appel de la Normandie et du SM Caen, qu’il rejoint en 1998, avec le titre de directeur du centre de formation. Parmi ses élèves, Ronald Zubar, Mathieu Bodmer ou encore Bruno Grougi. En 2001, Larguet répond à l’appel du voisin et rival régional, Le Havre AC alors que Manchester United lui faisait du pied…
Cette fois, Nasser va entraîner et diriger le groupe élite, qui intègre des joueurs de la post-formation, et évolue en CFA. A la fin de ce nouveau cycle, Strasbourg lui fait les yeux doux, à l’été 2004, alors qu’il est toujours sous contrat au HAC. Il résilie pour se libérer et rejoint le géant alsacien en L1, où il va permettre à certains de franchir le cap du professionnalisme, comme Morgan Schneiderlin.
Sa philosophie, il l’a exprimée à France Football en 2006 : « Quand on recrute un jeune, c’est pour en faire un pro. Si ce n’est pas le cas, on aura quand même gagné un homme ». Déjà approché par la Fédération marocaine au début de son cursus pro, il finit par céder aux avances de la FRMF qui voulait lui confier la DTN. Mais en 2008, Larguet prend le poste de directeur national de l’académie Mohamed VI tout juste créée et basée à Rabat. Un écrin moderne qui va lui permettre, en compagnie d’autres formateurs, de bâtir un avenir doré pour le football chérifien. Sous sa direction, l’Académie aura formé plusieurs internationaux marocains actuels : Hamza Mendyl (Schalke 04), Youssef En-Nesyri (Leganes), ou encore le défenseur central de Dijon, Nayef Aguerd. Six belles années ponctuées de jolies réussites, avant de revenir, quelques mois seulement, au centre de formation de Caen. Avant d’accepter, enfin, les responsabilités de directeur technique national du Maroc en 2014. C’est à l’instigation de Larguet que le Maroc fera appel en 2016 à Hervé Renard, double champion d’Afrique 2012 et 2015, pour redonner du souffle aux Lions de l’Atlas.
Après la CDM 2018 et en dépit de l’émergence de grands talents pour le football national, Nasser Larguet sera pourtant démis de son poste de DTN par la fédération. La raison ? Des résultats jugés décevants chez les équipes de jeunes (U17, U20, U23) qui n’enlèvent rien cependant à la méthode de ce formateur si expérimenté et terriblement apprécié par tous ses anciens élèves. Sans parler d’une philosophie du jeu tourné vers un football résolument offensif et technique.
En juin 2019, Nasser Larguet est finalement retenu par l’Olympique de Marseille, devant le sélectionneur français des U17, Jean-Claude Giuntini, pour diriger le centre de formation phocéen. Avec comme impératif de réformer la formation à l’OM. Une nouvelle direction donnée à sa carrière et la reconnaissance par l’un des plus grands clubs français du savoir accumulé durant plusieurs décennies. Sa grande connaissance du football africain est également un plus et une passerelle vers le continent.
@Samir Farasha
Prochain épisode, demain, avec le destin de l’Algérien Abdelhamid Kermali.