Beyrouth est son antre, le football sa passion. Milieu défensif, elle a évolué une saison au Sadaka Club, Aya Chiry, 28 ans, a même fêté sa première cape en sélection en 2013. Le parcours de cette libanaise est vraiment atypique. Ancienne basketteuse de bon niveau, elle pratiquait également le football. Mais la multiplication des blessures l’a contrainte à faire un choix. Elle a du laisser tomber la balle au panier.Et elle ne le regrette absolument pas aujourd’hui. Grâce à ce sport, elle a pu voyager, voir du monde, rencontrer des personnes et faire des projets. Dont le moins excitant n’est pas cette académie de futsal qu’elle vient d’inaugurer et dont elle pense faire un modèle dans son pays. Parce que la native de Beyrouth est également la capitaine de « Stars Aacademy », une équipe de football en salle. Des projets, elle en a une flopée, même si elle dit vouloir les murir avant d’en parler publiquement. Mais Aya, ce n’est pas que les jambes d’une sportive accomplie. C’est aussi une tête pleine. Diplômée universitaire en chimie et en marketing, elle travaille comme représentante dans l’industrie de la cosmétique médicale pour le compte de la compagnie américaine, Obagi C’est cette jeune femme pétillante qui se confie avec une légereté rafraichissante et en exclusivité à 2022mag.com.
Aya, racontez-nous comment vient-on au football lorsqu’on est une jeune femme à Beyrouth ?
En vérité, je pensais être destinée à faire toute une carrière en basket. Je pratiquais aussi le football, mais le basket occupait une place plus importante. Puis, une série de blessures – trois en deux ans -m’a donné à réfléchir. Par ailleurs, mes parents m’ont “sommé” de choisir entre les deux disciplines. Pour préserver ma santé. Après une longue réflexion, je me suis rendu compte que ma passion pour le football était plus importante et j’ai tranché dans le vif.
Sans regret ?
Aucun. J’ai vécu de belles expériences grâce au football et je n’ai pas fini d’en vivre, je l’espère.
Votre meilleur souvenir de footballeuse ?
Une grande tournée à travers l’Europe avec l’équipe universitaire. Nous avons joué à Saint-Petersbourg en Russie, en Espagne, en France.
Avez-vous grandi dans une famille de sportifs de haut niveau ?
Pas spécialement. Ma mère est une universitaire et une auteure reputée. Mon père, officier dans l’armée, pratiquait par le force des choses beaucoup de sport. Mais il n’était pas dans la compétition.
Que peut-on dire de la situation du football féminin au Liban ?
Il y a pas mal de passion autour, mais si peu de moyens. Nous ne sommes pas la priorité des institutions. Pour pratiquer leur sport, les filles ne pouvent compter que elles mêmes. On se sacrifie souvent financièrement pour y arriver.
Il existe un championnat national ?
Oui. Mais avec seulement huit clubs en compétition. L’essentiel est à Beyrouth.
Et sur le plan international ?
( Hésitante).Aujourd’hui, c’est beaucoup trop calme à mon goût. Si l’équipe des U17 dispute actuellement le Championnat arabe des nations à Doha, je sais par contre que notre pays ne participera pas aux éliminatoires des Jeux olympiques 2016. Et c’est bien dommage. Plus embêtant encore, le Comité qui gère le football féminin à la Fédération a décidé de ne sélectionner que des filles de moins de 19 ans en équipe nationale. Quel dommage de se priver de joueuses talentueuses et expérimentées!
Vous semblez un peu moins enthousiaste ?
Je veux bien être optimiste pour le football féminin dans mon pays. A condition qu’il y ait un vrai changement dans la gestion et l’organisation des institutions qui le dirigent. Il faut que la compétence et l’intérêt général prennent le pouvoir.
Du coup, à titre personnel, vous avez décidé de vous investir dans le futsal en créant votre académie. Vous nous en parlez un peu?
Oui. Il y a peu, j’ai inauguré mon centre Swat Academy (Sport with attitude). Construit sur un terrain qui m’appartient. Nous débutons avec une quarantaine de joueurs et joueuses âgés de 4 à 17 ans. C’est un belle aventure qui nous attend. Le futsal présente l’avantage d’être un projet accessible sur le plan financier. Mais pour le faire vivre, nous aurons tout de même besoin de partenaires, de sponsors et de mécènes. Nous nous attelons à la tâche. C’est difficile mais passionnant.
On suppose que la footballeuse s’intéresse un peu aux footballeurs…
Evidemment. Et pas qu’un peu. Je suis une grande consommatrice de matchs à la télé.
Quels sont vos joueurs préférés ?
(Enthousiaste). Andrea Pirlo ! Quel magnifique joueur! Il a tout pour lui: la technique, l’intelligence, la vision du jeu et l’esprit collectif…
Qui d’autre, encore?
Javier Zanetti. Lui, c’est carrément une légende. J’aime sa personnalité, sa combativité. Il ne lâche jamais rien. Il possède ce que je ne dissocie jamais de la compétence technique chez un sportif haut niveau, à savoir les qualités humaines et les belles valeurs.
Il n’ y a que des joueurs du Calcio dans votre liste ?
(Elle rit). Non, j’adore aussi Zlatan Ibrahimovic. Il est l’un des tous meilleurs attaquants et buteurs de la planète. Et puis, quel tempérament ! J’ai suivi son match à la télé hier (NDLR entretien réalisé mercredi soir) contre Chelsea avec le Paris SG. Il a été grand. Si j’intéresse à Paris, la Juventus de Turin reste mon club préféré en Europe.
Dans le football féminin, des joueuses t’impressionnent particulièrement ?
Il y en a un paquet. Mais je pense avant tout à mon amie jordanienne, Stéphanie Al Naber. Milieu offensif, elle est pour moi l’une de meilleures dans le monde arabe et au delà. Elle a déjà joué à l’étranger ( Fortuna Hjorring au Danemark et Al Sadaka au Liban), mais vous la verrez sans doute bientôt évoluer dans un bon club européen. Peut être en France. J’admire également la Lyonnaise Louisa Nécib et l’Américaine Alex Morgan. Et puis, je suis aussi fan de la grande équipe d’Allemagne.
Le football de haut niveau,l’Académie de futsal, un métier pointu dans l’industrie du cosmétique médical, cela laisse-t-il de la place à d’autres passions? Aimez vous la musique, par exemple?
Et comment ! j’adore le piano. J’en ai beaucoup joué quand j’étais petite. J’écoute beaucoup de musique classique, mais j’aime également la variété arabe.
Vous lisez beaucoup ?
Je m’intéresse particulièrement aux ouvrages concernant le développement personnel et les écrits sur la vie en société. Et bien sûr, tous les livres qui parlent de football.
Propos recueillis par Fayçal CHEHAT