L’Espérance de Tunis a été sacrée aux dépens du Wydad après que son adversaire eut abandonné le terrain, en réaction contre l’arbitrage. L’édition 2019 de la Ligue des champions restera donc ternie par de lourdes polémiques liées aux sifflets du continent…
C’est une évidence, et à 2022mag, nous n’y trouvons aucune satisfaction : il y aura eu un avant et un après Radès. Dans la nuit du 31 mai au 1er juin s’est jouée en Tunisie une tragicomédie qui laissera forcément un goût amer dans la bouche de tous ceux qui continuent de croire en l’honnêteté et la probité dans le sport. Mais ils ont été trahis. Et c’est le football africain qui risque d’en payer un lourd tribut.
Vendredi nuit, le WAC, se sentant dupé par l’arbitrage du Gambien Gassama, a en effet quitté le terrain après qu’un but parfaitement valable lui ait été refusé. A cet instant, l’Espérance menait au score 1-0. Plus d’une heure plus tard, l’arbitre revenait sur le terrain valider le succès de l’Espérance. En cause, l’arbitrage, le VAR et bien d’autres faits venus pourrir le sommet continental des clubs. Au bout de la nuit, la honte et l’incompréhension.
Après la finale aller de la LDC africaine, marquée par un arbitrage calamiteux de l’Egyptien Grishad, suspendu pour six mois dans la foulée par l’instance faîtière du football africain, on espérait évidemment pouvoir se concentrer sur le jeu et uniquement sur le jeu. Un vœu pieux qui n’a jamais été exaucé.
Bien sûr, à quelques heures de jouer ce match retour, le WAC déplorait amèrement les décisions du sifflet égyptien qui lui avaient été défavorables à Rabat. Ses joueurs ne pouvaient ignorer que le déplacement en terre tunisoise sentait le soufre et malheureusement, ce qui devait être l’apothéose d’une saison a tourné au cauchemar.
L’Espérance avait bien débuté, et inquiétait un adversaire obligé de marquer pour espérer le faire douter. A la 21e, les Sang et Or auraient pu bénéficier d’un penalty mais Gassama ne bronchait pas. Quelques minutes plus tard, l’Algérien Youcef Belaïli, l’un des hommes en forme, expédiait un missile dans la lucarne de Tagnaouti (1-0, 41e). Taraji, soutenu par ses dizaines de milliers de supporters, pouvait respirer : ce but obligeait le WAC à inscrire au moins deux buts pour passer devant sur l’ensemble des deux rencontres.
Au retour des vestiaires, les débats s’équilibraient, l’Espérance souffrait. Le WAC poussait et sur un centre de la droite, Walid El-Karti expédiait une tête dans le but de Jridi, vers la 59e. Egalisation ! Alors que ce but était parfaitement valable, Gassama suivait son arbitre assistant et le refusait.
Cette décision marquait le début des protestations du WAC, des joueurs au staff en passant par certains dirigeants. Le WAC exigeait alors de l’arbitre que soit utilisée le VAR pour vérifier sa décision. Peine perdue puisque le système ne fonctionnait pas… S’ensuivirent de longues, longues minutes d’attente. Les joueurs marocains refusaient de reprendre le match, le VAR ne fonctionnant pas !
Au contraire, ils demandaient à revoir le but qui leur avait été refusé. De leur côté, les Espérantistes s’échauffaient dans l’espoir d’une hypothétique reprise de la finale, en vain comme on l’a vu.
Selon certaines sources, les deux formations auraient été informées avant match que le système était défectueux et donc inutilisable avant la rencontre. Côté marocain, on répond qu’on ne le savait pas… Mais alors, pourquoi l’arbitre Gassama a-t-il fait mine de consulter le VAR, s’il savait que l’assistance vidéo ne fonctionnait pas ?
A un moment donné, on a même vu le président de la CAF descendre sur le terrain, ajoutant un peu plus à la confusion qui régnait à Radès. Après plus d’heure et demi d’attente et de palabres dans la coulisse, l’arbitre revenait sur le terrain et déclarait l’Espérance vainqueur, puisque le WAC avait décidé de ne pas recommencer la rencontre…
L’Espérance était donc sacrée championne d’Afrique, comme en 2018, devant son public, et l’année de son centenaire. Mais ce titre est à jamais marqué du sceau de la honte.
Que s’est-il passé pour que le VAR ne soit pas opérationnel ? Certaines sources parlent d’un problème de livraison du système… On en saura certainement de façon plus précise dans les jours qui suivent. Il aurait en tout cas été judicieux pour la CAF, dont la responsabilité est à notre sens engagée, d’anticiper sa non utilisation en l’annonçant publiquement avant match, y compris au public et aux médias…
Que dire également de l’arbitrage de Gassama, réputé jusqu’alors comme l’un des meilleurs sifflets continentaux, coupables d’une erreur magistrale qui devrait lui coûter cher, alors qu’il est pressenti pour la CAN à venir ?
On peut s’interroger aussi sur la décision du WAC de ne pas poursuivre la rencontre alors qu’il lui restait suffisamment de temps pour refaire son retard. Refuser de jouer était-elle la meilleure solution ? A l’arrivée, le club devrait être sanctionné par la commission de discipline de la CAF. Celle-ci a-t-elle prévenu les Wydadis de ce qu’ils risquaient ? Pas sûr…
Aux dernières nouvelles, le Wydad a décidé de saisir le TAS. « C’est injuste et nous ne comptons pas garder le silence, a expliqué le président wydadi Saïd Naciri. Nous allons recourir à toutes les procédures légales y compris la saisie du TAS et de la FIFA », a t-il déclaré au terme de la rencontre. « Il s’agit d’un échec pour tout le football africain. Après ce massacre arbitral, l’Afrique est sur la sellette », a-t-il ajouté, dans des propos rapportés par nos confrères d’Atlasinfos.
La CAF, de son côté, n’a eu d’autre choix que d’intégrer urgemment un point relatif à cette finale dans l’ordre du jour du ComEX qui se réunira mardi 4 juin à Paris, à la veille du congrès de la FIFA. Les débats promettent d’être agités entre le président Ahmad et Fouzi Lekjaa, le président de la fédé marocaine et l’un des vice-présidents de la CAF.
Tout cela n’a évidemment rien de rassurant à vingt jours du coup d’envoi de la 32e édition de la CAN en Egypte, où le VAR sera utilisé à partir des quarts.
Certains observateurs, depuis samedi matin, parlent de la nuit où le football africain est mort, à l’issue d’une finale commencée en main et terminée en juin dans la confusion la plus totale. Comme on les comprend…
@Samir Farasha
La feuille de match
ESPERANCE TUNIS TUN) – WYDAD CASABLANCA (MAR) 1-0 (1-0). Arbitre.: M. Gassama (GAM). But : Belaïli (41e). WAC quitte le terrain, l’Espérance déclarée vainqueur.
ES Tunis : Jridi – Derbali, Yacoubi, CHemmam, Ben Mohamed – Coulibaly, Kom – Badri, Bguir, Belaïli (Elhouni, 61e) – Khenissi. Entraîneur : Chaabani. WA Casablanca : Tagnaouti – Noussir, Nahiri, Comara, El Amloud – Saïdi – EL Haddad, El Karti, Jabrane, Badi – Hassouni. Entraîneur : Faouzi Benzarti.