De passage à Paris la semaine dernière, dans le cadre prestigieux de l’assemblée nationale française, Moulay Hafid Elalamy est venu présenter le dossier du Maroc à l’organisation de la coupe du monde de football 2026. Le ministre aux multiples portefeuilles (commerce, industrie, investissements, économie numérique) s’est montré confiant sur la candidature de son pays et optimiste quant aux nombreux soutiens dont bénéficie le royaume chérifien.
Comment pouvez vous définir la candidature du Maroc à l’organisation de la coupe du monde 2026?
Moulay Hafid Elalamy : C’est une candidature de tolérance, d’ouverture, de qualité,de proximité. C’est aussi la possibilité pour les fans de rentrer facilement au Maroc avec des visas normaux. Nous sommes ravis au pays de sentir cette chaleur et cette fraternité qui sont aussi des symboles des valeurs footballistiques. C’est ce que voulons mettre en exergue dans cette Coupe du monde 2026. Nous souhaitons de tout coeur que cette compétition soit organisée sur le continent africain et à quatorze kilomètres de l’Europe.
Ce serait la seconde fois en Afrique après l’Afrique du Sud en 2010?
C’est un continent qui compte pas mal de pays. Si on fait la statistique, on comprend que la quote-part revenant à l’Afrique n’a pas encore été atteinte. On a de la marge. Quelques pays africains pourraient l’organiser. Je le souhaite vraiment car ce type de manifestation est censé constituer un accélérateur de développement.Ce sont là des valeurs que le football doit continuer à implanter dans le monde et dans cette famille de 211 participants.
Qu’avez vous appris des candidatures précédentes qui ont été malheureuses pour le Maroc?
Beaucoup de choses. Le premier travail que nous avons accompli était de disséquer les candidatures passées et de voir ce qui était utile et ce qui ne l’était pas. Ma constatation la plus importante est que le changement est profond. On passe de 24 à 207 votants. Avant, c’était davantage du lobbying que des dossiers. Aujourd’hui l’aspect technique est fondamental. On ne peut pas venir avec un dossier léger et penser gagner la Coupe du monde. 40000 pages soit 24 tomes, c’est du lourd. Nous avons une candidature de toute première qualité.
Avez vous senti que la Task Force de la FIFA (commission chargée d’évaluer la candidature du Maroc) a sous-estimé le dossier marocain?
Sans conteste. C’est normal. On n’imagine pas que le Maroc a fait ce bond là. On se dit qu’on arrive sur un terrain qui est facile à éliminer en pensant que ceci ou cela ne doit pas être fait ou exister. Quand ils sont rentrés pour creuser et vérifier en profondeur, ils ont constaté que ce n’est pas tout à fait comme ils l’imaginaient au départ. Je peux dire que c’est une satisfaction personnelle.
On vous sent assez serein…
On est toujours serein quand on prépare un examen correctement. Quand on sèche quelques sujets, on tremble un peu. Mais quand on fait son travail, on est tranquille. Et ce quelle que soit l’issue. Il ne faut jamais avoir des choses à se reprocher. Dans le cas d’espèce, nous allons réussir largement. Vous allez le constater.
De quels soutiens disposez vous en Europe? Est ce que cela peut se jouer grâce à ce continent?
Cela va se jouer parmi les 207 votants. Le 13 juin, chaque voix comptera. Celles venant d’Europe sont importantes.Nous avons beaucoup de soutiens européens, énormément d’Afrique et dans le reste du monde. Je ne voudrais pas divulguer, ni gêner qui que ce soit mais nous sommes très confiants.
Justement le député européen Gilles Pargneaux a lancé un appel pour que chacun joue de son influence
Toutes les rencontres ont pour objectif un accompagnement de cette candidature. Une dossier qui n’est pas exposé est voué à l’échec parce que les gens ne la connaissent pas. Même si votre candidature tient la route, si vos arguments sont bons, s’ils sont confidentiels, le vote risque de l’être aussi. Notre mission est de mettre sur la place publique nos avantages. Nous espérons que les messages seront reçus.
C’est donc important d’avoir le soutien des influenceurs y compris politiques?
Tous les influenceurs sont importants. Tout d’abord, les présidents des fédérations de football. C’est nôtre rôle de les convaincre en premier. Nous avons rencontré pratiquement l’ensemble des présidents qui participent au vote. Nous rencontrons aussi, comme aujourd’hui, les influenceurs qui sont en mesure de porter la bonne parole ou d’expliquer pourquoi leur pays ont pris telle orientation plutôt qu’une autre.C’est fondamental que les valeurs et la technicité d’un dossier soient exprimées. Quand on assiste à une présentation comme la nôtre pour la première fois, on doit découvrir que les stades relèvent d’une technique qui n’avaient jamais été mises en oeuvre.
La FIFA a été agréablement surprise par la démarche. Nous avons essayé, dans la mesure du possible, de comprendre totalement quelles étaient les valeurs que la FIFA et le football veulent mettre en avant. Ils ont par exemple été sensibles à l’héritage de ces stades. On ne souhaite pas investir un dhiram dans une opération à fonds perdus.Cela n’a pas d’intérêt. On ne veut pas avoir de coupe du monde au Maroc si elle ne génère pas de valeurs ajoutées pour les habitants et pour tous les participants. Notre objectif n’est pas de réaliser une coupe du monde. Cela n’a pas d’intérêt en soi. Cela n’est utile que si cela draine dans son sillage un certain nombre de valeurs, de partage, d’évolution…C’est l’objectif qui a été assigné. Nous n’avons pas tordu le cou aux stratégies marocaines pour répondre à un besoin de la FIFA. C’est ce que j’ai annoncé dès le premier jour. Avec ou sans Coupe du monde, ce qui a été présenté au public sera fait.
Propos recueillis par Nasser Mabrouk