Nouveau sélectionneur du Soudan, le technicien français s’est amicalement prêté au jeu des questions-réponses pour évoquer sa nouvelle mission et sa découverte d’un football qu’il connaissait déjà un peu. Une exclusivité 2022mag.
« Hubert Velud, bonjour. Le Soudan n’est pas considéré comme une grande nation actuellement. Qu’est-ce qui vous motivé au moment d’accepter ce challenge ?
C’est vrai, le Soudan n’est pas considéré comme une grande nation d’Afrique. Pas encore, en tout cas. Je suis arrivé ici en me disant que le potentiel existe. C’est un potentiel que je connais puisque j’ai souvent affronté Al-Hilal et El-Merreikh. Je crois dans le potentiel de ces joueurs. C’est donc pour le projet sportif que je suis venu à Khartoum. Et puis bien sûr, pour la fonction de sélectionneur.
Justement, retrouver le banc d’une sélection, près de dix ans après le Togo, c’est quelque chose que vous souhaitiez ?
Effectivement. J’avais déjà occupé cette fonction au Togo. C’est vrai que dans un coin de ma tête, il y avait toujours cette idée de revenir dans cette fonction quelque part en Afrique. Le Soudan m’a offert cette possibilité. La frustration de ne pas avoir pu jouer la CAN 2010 après les évènements que vous connaissez (l’attaque du car des Eperviers à Cabinda), c’est une forme de thérapie de venir au Soudan et d’essayer de les qualifier pour la CAN 2021 au Cameroun. Inchallah !
Avez-vous commencé à vous constituer une base de données joueurs sur le championnat ? Ou êtes-vous déjà allé ?
Oui, il y a une liste assez élargie de joueurs ici dans le championnat qui sont identifiés, avec notamment un gros travail de mon adjoint Khaled Belkhit. Nous avons pu effectuer un premier stage de quatre jours durant lequel j’ai pu faire connaissance avec l’effectif. J’ai déjà assisté à pas mal de matches du championnat. Je me suis rendu à Port-Sudan, à une heure vingt d’avion de la capitale tout dernièrement. Je suis les matches et j’ai une vraie idée par rapport au niveau local.
Justement, quel type de relations entretenez-vous avec vos homologues des clubs ? Avez-vous commencé à échanger ?
J’ai déjà commencé avec eux, notamment le coach de Khartoum Watanya que je connaissais déjà puisqu’on s’était affrontés en club quand il était à El-Merreikh. Il y a également un Tunisien qui vient d’arriver à Merrreikh avec lequel j’ai longuement échangé. Pareil à Port-Sudan. Ca se met en place petit à petit. Les échanges avec les techniciens locaux sont importants, capitaux même, dans mon travail.
Pour vous, le foot soudanais se résume-t-il seulement au duel fratricide Merreikh-Hilal ou bien avez-vous repéré d’autres forces vives ailleurs ?
Non, il n’y a pas que ces deux clubs au Soudan Dieu merci, même si ces deux entités possèdent les meilleurs joueurs et restent les plus fortes sportivement. Il y a deux ou trois autres clubs qui peuvent aussi soutenir la comparaison comme Al-Obeid, Khartoum 3 (Watanya), un bon club formateur ou El-Merreikh d’El-Fasher.
Le Soudan a commencé les éliminatoires CAN 201 par un succès 4-0 sur Sao Tome et une courte défaite 1-0 contre l’Afrique du Sud. Vous affrontez dans trois semaines le Ghana en matches miroir (aller-retour). Comment voyez-vous vos chances de qualification ?
Nos chances de qualification dans le groupe sont intactes vis-à-vis de notre nombre de points et ceux de nos adversaires. Devant nous, il y a deux matches importants contre le Ghana avec aller là-bas le 27 mars et match retour chez nous le 31 mars à Omdurman. Ce sera évidemment déterminant pour la suite de la compétition.
Comment préparez-vous ce double rendez-vous ?
Nous préparons cette double confrontation contre le Ghana de manière spécifique avec une préparation assez longue. On aura les joueurs à partir du 12 mars, pour un premier match le 27. Après quelques jours à Khartoum, on se rendra le 15 mars pour un amical au Togo contre les locaux, programmé le 21. A partir du 22, nous rejoindrons le Ghana voisin et Accra. Bref, une préparation, je le répète, assez longue.
Sur quels joueurs comptez-vous vous appuyer ? Y aura -t-il des expatriés par exemple, très rares dans le foot soudanais ?
Le groupe sera constitué en grande partie de joueurs issus du groupe avec lequel j’ai travaillé tout récemment. Il y aura peut-être un joueur très connu ici, l’attaquant Mohamed Abdelrahman (ex-Merreikh) qui joue en Algérie au CA Bordj Bou Arreridj. Faire venir des expatriés, c’est un peu nouveau ici ! C’est un groupe auquel on pourrait ajouter 3 expatriés. Il y a aussi un jeune élément issu des Olympiques que je risque d’intégrer. Donc, un petit peu de nouveauté !
Est-ce que votre présence pourrait favoriser le scouting de talents soudanais hors du pays ? A ce sujet, avez-vous été contacté par des clubs, ou signalé des talents ?
En France, il n’y a pas de Soudanais. Mais on m’en a signalé en Italie, en Roumanie, en Angleterre et même en MLS nord-américaine. C’est un peu nouveau pour eux. C’est un filon que l’on veut explorer. On n’en est qu’au début.
Parlez-nous de votre encadrement technique…
Le staff technique ne comprend qu’un Algérien. Il y en a un chargé de la formation et l’autre qui fait la formation des entraîneurs. Par contre, j’ai ramené un préparateur physique du MC Alger, Fares Belkhir, qui ne sera présent que pour le stage de préparation pendant trois semaines. L’adjoint est Khaled Belkhit, un ancien international soudanais, plus un intendant, un kiné, un coach des gardiens.
Vous êtes le premier Français depuis Diego Garzitto à travailler au Soudan. Garzitto avait gagné le championnat avec les deux grands clubs. Vous a-t-on parlé de lui localement ?
Oui, effectivement, Garzitto est une vraie star ici, il est connu et apprécié ! Il a été un précurseur en quelque sorte. Je suis content par rapport à ça, en plus c’est un bon ami et j’avais consulté longuement Diego avant de signer au Soudan.
EN éliminatoires de la CDM 2022 le Soudan affrontera la Guinée de Didier six, le Maroc de Halilhodzic, et la Guinée Bissau, 3 habitués de la CAN. Quel sera votre objectif dans un groupe si relevé ?
L’objectif, c’est bien sûr la qualification pour la CAN 2021. Les éliminatoires CDM 2022 vont arriver vite, cet automne. Ce sera difficile mais tout dépendra de la dynamique suscitée pendant les éliminatoires CAN. Le Maroc et la Guinée sont de bonnes équipes. Le groupe n’est pas facile mais je crois au potentiel, on jouera notre chance à fond.
Un dernier mot sur votre précédente mission avec la JS Kabylie. Quel bilan sportif et personnel faites-vous de ce passage chez les Canaris du Djurdjura ?
Très heureux d’être passé par la JSK qui restera dans mon cœur. Bon, ça reste un club en construction. Il y a un peu de pression et d’impatience autour de ce club mais je pense qu’avoir fait mon travail plus que correctement. Je les ai qualifiés pour la phase de groupe de la LDC africaine après avoir écarté El-Merreikh et le Horoya Conakry, ce qui n’est pas rien. Le club est troisième et donc en capacité de se qualifier pour une prochaine coupe continentale. J’ai été très bien reçu là-bas et il est prévu que j’y retourne très prochainement ».
Propos recueillis par @Samir Farasha